Saisie de la CPI contre le Sénégal : Aissata Tall Sall qualifie la démarche de Juan Branco de “puérile et ridicule”
À la suite de l’initiative d’un avocat de l’opposant sénégalais Ousmane Sonko, qui veut poursuivre le président sénégalais Macky Sall pour « crimes contre l’humanité » devant la justice française et la Cour pénale internationale, la ministre sénégalaise des Affaires étrangères, Aïssata Tall Sall, réagit sur RFI et France 24 en qualifiant cette démarche de « puérile et ridicule ».
« Je suis avocate avant d’être une femme politique et ministre. Je trouve que cette démarche de ce confrère est à la fois puérile et ridicule. Elle aurait pu être puérile et s’en arrêter à ça. Mais elle est les deux à la fois », commence par dire l’ancienne responsable socialiste.
Elle s’interroge : « Que nous dit le statut de la Cour pénale internationale ? ». Et de répondre : « Il n’y a que trois personnes pour saisir la Cpi, un Etat parti, le Conseil de sécurité des Nations unies ou le procureur. Où va-t-il (Juan Branco, ndlr) saisir la Cour pénale internationale sans passer par le procureur. Et une fois que le procureur est saisi, il faut qu’il vérifie la complémentarité de l’action judiciaire, c’est-à-dire que la Cpi ne peut pas se prononcer tant qu’il y a une justice interne, nationale qui suit son cours pour les mêmes faits. Et c’est le cas au Sénégal ».
« Maintenant, pour la saisine de la France, c’est là qu’on tombe dans le ridicule. Il ne le dit pas, mais j’espère que ce confrère veut se fonder sur la compétence universelle qui a aussi ses conditionnalités parfois même beaucoup plus draconienne », a poursuivi la ministre des Affaires étrangères.
« Mais au-delà de tout ça », rappelle-t-elle « il est question du Sénégal, notre pays, où il y a eu des violences le 1er et de le 2 juin. Il s’est passé quelque chose de grave pour lequel nous sommes en train de situer les responsabilités. Quand on voit les policiers attaqués et agressés, quand on voit les casernes de gendarmerie, les édifices publics brûlés avec des cocktails Molotov, tout cela est acté et prouvé, quand on voit des manifestants tirer sur des manifestants, en quoi la Cour pénale ou la compétence universelle peut venir s’incruster dans cette affaire du Sénégal alors que la justice nationale est en train de faire son travail ? »
A en croire Me Aïssata Tall Sall, le Président Macky Sall a dit dès le premier jour qu’il faut donner le nombre de morts. « Il y a eu 9 ensuite 16 morts le deuxième jour », renseigne-t-elle, avant d’ironiser : « Maintenant, il y a des morts que la mer est en train de refouler. On nous peint un tableau chaotique. Pour nous, c’est de l’enfantillage et c’est ridicule. Quand les forces de l’ordre sont en état de légitime défense, que vont-il faire? Tout ça nous ramène à l’enquête que le juge est en train de mener », souligne le chef de la diplomatie sénégalaise.
Par ailleurs, Aïssata Tall Sall s’exprimée sur l’éventuelle candidature du chef de l’État sénégalais à un troisième mandat, en février 2024. Enfin, au moment où s’achève le Dialogue national à Dakar, elle se dit favorable au fait que les opposants Khalifa Sall et Karim Wade, bien que condamnés dans le passé, puissent se présenter à cette élection présidentielle.
Djibril DEME